La 2e Guerre Mondiale à Châlons et autour

De l'exode au retour. Récits de civils et de militaires champenois

1939 - 1945

Nous regroupons et présentons ici les recherches de nos membres sur la 2e Guerre Mondiale à Châlons, et notamment les parcours de membres de leur famille ayant connu l'exode en juin 1940, mais aussi d'hommes (père, beau-père) faits prisonniers de guerre en 1939-1940 et envoyés dans des camps en Allemagne (Stalag pour les soldats et les sous-officiers, Oflag pour les officiers).

Ces recherches sont basées sur la documentation personnelle conservée par les familles :

-journal tenu par le prisonnier de ses déplacements puis de son quotidien en camp de travail,

-correspondance échangée avec la famille

-cartes telles que la Personalkarte,

-fiche de rapatriement, 

-photographies, etc.

Ces recherches ont permis de découvrir également des documents conservés par des associations d'anciens prisonniers et déportés (comme à Jâlons).

Elles sont aussi l'occasion de faire un focus sur les documents conservés aux archives et à la bibliothèque municipale de Châlons, comme le fonds Alleau.

 

Pour découvrir une histoire plus détaillée de ce type de correspondance, consulter ce document conçu et rédigé par l'Association Philatélique de Rouen et Agglomération. :
http://www.apra.asso.fr/APRA/Articles/HS9-PrisonnierGuerreFrancais-1.pdf

Raymond Voltz. L'itinéraire d'un prisonnier de guerre (1939-1945) : de la Marne à l'Autriche

Carnet de bord tenu par le prisonnier de guerre Raymond Voltz au cours de la période 1940-1944

 

 « Lundi 29 Juillet 1940. Jusqu’à ce jour, je n’avais pas jugé utile de faire le journal de ma vie de prisonnier, car j’espérais en une libération rapide, mais je vois que les jours se succèdent aux jours, sans apporter aucun changement à la situation, c’est pourquoi, ayant trouvé ce carnet cet après-midi, étant en corvée, je me décide à noter mes impressions journalières et l’emploi de mon temps, mais avant je  vais récapituler approximativement depuis le 9 Juin mon odyssée car c’est depuis ce jour que ma vie devient assez mouvementée. »

Ainsi débute le carnet de bord du soldat de 2° classe Raymond Voltz né le 20 novembre 1917 à Venteuil (Marne), menuisier-charpentier, marié à Fernande Voltz, père d’un fils, Alain, âgé de 8 ans, habitant rue du Bauchet à Saint-Memmie (Marne).

 

La drôle de guerre

Mobilisé le 24 août 1939, il rejoint le 139° régiment d’infanterie qui est un régiment de forteresse, chargé en particulier de la défense du sous-secteur fortifié de la Crusnes sur la ligne Maginot (secteur 9 de Metz) entre

Bréhain-la-Ville et le camp de Mortefontaine (Meurthe-et-Moselle).

La débâcle, le repli vers l’Ouest

Le journal de Raymond Voltz en fait très exactement l’illustration à partir du 14 juin 40. Son groupe de 10 soldats progresse vers l’ouest, d’abord en car puis à pied. « on voit de tous côtés que fumées : dépôts de vivres, d’habillement, de carburant qui brûlent, le ciel est obscurci, on croise des convois de réfugiés. Je nous revois en 1918 et je pense à ma femme Fernande et à mon petit Alain qui sont peut-être dans la même situation. »

A Gondreville, le groupe franchit la Moselle, ils ont fait 45 km. L’ordre de repli est donné dans la confusion la plus complète, ils essaient d’éviter les Allemands : Dommarie, Collombey plus de vivres, plus d’encadrement. Un réfugié leur dit que l’armistice doit être signé. C’est à Rémoville (Vosges) que Raymond Voltz devient prisonnier de guerre. Après un périple d’une centaine de kms à pied environ, dans l’incertitude la plus totale et la débandade générale qui jetait sur les routes soldats et simples gens qui s’enfuyaient devant l’ennemi.

 

La captivité

Les prisonniers, 2500 environ, sont regroupés à la caserne des gardes mobiles quartier Foch à Chaumont (Haute Marne), le 24 Juillet. Raymond Voltz essaie d’écrire des lettres pour prévenir sa famille. L’espoir le tient

d’être renvoyé chez lui. Mais la lecture des journaux dissipera cette illusion. Il ignore que sa femme et son fils avec d’autres parents sont sur les routes de l’exode. Son souci constant, tant que durera sa captivité, sera

de correspondre avec ses proches, d’avoir des nouvelles, un vrai leitmotiv qui court à travers son journal. L’autre souci est la nourriture très insuffisante pour des hommes affaiblis par le repli à pied depuis la ligne

Maginot. « le moral est déjà bien bas, écrit-il », le vol de son portefeuille contribue « à sa dépression » « je ne serai pas surpris que l’on nous mène en Allemagne. » ce qui le tracasse, c’est de ne plus avoir les photos de ceux qui lui sont chers. « c’est dur d’être dans l’incertitude, le 14 Août toujours pas de nouvelles...il y a des moments où je me désespère complètement... »

Direction l’Allemagne : par Landau, Gemersheim ( passage du Rhin) Sttutgart, puis l’Autriche, Salzburg, Ems, Krems an der Donau sur la rive gauche du Danube à 70-80 kms de Vienne. Son périple en train se termine

à cet endroit, le 24 Août 1940 ; d’abord en camp de tentes puis en baraquements où les prisonniers sont regroupés par métiers ( il est affecté à celui du bâtiment).

 

Prisonnier de guerre n°42571 au stalag XVII B puis A de la région de Vienne

Son carnet de bord décrit sa vie, ses activités, du 24 Août 1940 au 10 Août 1944. Les 2 premières années sont détaillées et précieuses pour nous qui le lisons ; mais vers le milieu de l’année 1942 jusqu’à l’arrivée des troupes américaines le carnet ne comporte que les mentions de colis.

Grâce à son billet jeté du wagon en partance pour l’Allemagne et ramassé par une habitante de Dombasle, qui l’a transmis à sa famille, celle-ci apprendra à son retour d’exode qu’il est vivant et en bonne santé .

Puis la Croix Rouge le signalera comme prisonnier de guerre en Autriche.

A Krems puis à Guttenbrunn, son groupe sera occupé à des travaux de maçonnerie. Enfin , le 9 novembre il reçoit la première lettre de sa femme.

 

1940 : premier Noël de prisonnier :

« la Noël des prisonniers a été marquée plus que je ne l’aurais cru hier : nous avons eu des friandises et

chacun un demi-litre de bière. Il y toujours de la neige et il gèle toujours entre -12°et -15° la nuit et -8° à -10° le jour. Le travail est arrêté sauf pour nous qui montons le lavoir. Pour les autres, le travail est de déblayer les routes quand elles sont trop engagées. A 4 copains nous avons eu notre petit Noël de la part du docteur en médecine à qui nous avions transporté du bois ( gâteau, cigarettes, chocolat fin..). Après la soupe du soir nous avons eu concert avec instruments de fortune et chanteurs amateurs.

Quoique j’aurais été plus heureux de le fêter en famille, je dois convenir qu’ici ça a été moins triste que je ne l’aurais cru."

 

1941. La vie de prisonnier.

Elle est monotone, rythmée par le courrier reçu et envoyé, les colis, le travail sur différents chantiers, les conditions météorologiques ; cet hiver là fut rigoureux, mais il ne se plaint pas.

 

1942

De retour à Vienne, il va travailler en usine où il lime des pièces en aluminium.Les températures la nuit sont très froides, entre -18° et -24°.

A partir de maintenant, le carnet ne comporte plus que des indications concernant les colis reçus. Il n’apprécie pas d’être revenu au stalag «une vraie porcherie, la soupe n’en parlons pas, c’est préférable pour les coeurs délicats.» Il note cependant des alertes aériennes la nuit.

 

1943 Janvier:

Il est malade, il parle de grippe et d’albumine. Les conditions de détention doivent se durcir en même temps que l’Allemagne est entrée dans une nouvelle phase militaire, celle du repli et des défaites.

 

Fin du carnet août 1944.

 

1945

Nous connaissons les conditions de sa libération grâce au récit qu’il en fera à sa femme et à son fils. Devant l’avance de l’armée russe, les Allemands rassemblent les prisonniers et les font marcher vers l’ouest  le long du Danube. Durant cette marche épuisante et interminable, les prisonniers abandonnent leur barda petit à petit. C’est ainsi que Raymond Voltz ne conservera que quelques lettres de son fils et une paire d’écouteurs qu’il tient à lui ramener. Un matin, il n’y a plus de sentinelles. Le groupe de prisonniers est livré à lui-même, progresse toujours vers l’ouest, vivant plus ou moins de rapines. Ils traversent l’Inn en crue sur un bac dont ils ont brisé le cadenas qui l’immobilisait. Enfin, ils rencontrent les soldats américains. Ceux-ci après les avoir copieusement passés au DDT, les répertorient et les ramènent en France par avion à partir de Passau. L’avion fait escale à Epoye, petit village au nord de la Marne d’où une jeune fille envoie un télégramme à Fernande Voltz de la part de son mari.

 

L’avion repart vers Paris. Là, les prisonniers sont rassemblés dans un cinéma. Un civil parisien plein de gentillesse et d’admiration invite Raymond Voltz au café, lui demande s’il a de l’argent allemand, lui propose de l’échanger à la banque proche, le laisse devant un demi de bière ... et ne revient jamais. Beaucoup se sont fait prendre. Certains français prétendent que c’est bien fait, car cet argent a été gagné en participant à l’effort de guerre du Reich. Sans le sou, il réussit avec quelques autres à faire Paris-Châlons sur une locomotive à vapeur haut le pied. Sans aucun doute grâce à la solidarité des cheminots parisiens.

Il arrive à la maison le 14 Mai 1945.

 

Et après ces 1959 jours d’absence ? Raymond Voltz retrouve son foyer , son travail, ses amis, entreprend de construire sa maison de ses  propres mains. Il n’oublie pas son ancienne vie de prisonnier, car il écrit à un civil viennois, Johan Achrer, dont il a fait connaissance lorsqu’il travaillait en usine et qui apportait du pain aux prisonniers français. Celui-ci lui répond :  « ah, Raymond, comme il est bon d’être chez soi dans sa famille et de ne plus entendre parler de guerre.... »  Plus tard, au début des années 60, Raymond et Fernande irons en Autriche visiter les lieux où il avait passé les jours sombres de sa captivité. Sans amertume ni esprit de revanche. Venait le temps du travail de mémoire et de réconciliation. 

 
Travail de recherche, de lecture, de rédaction et de résumé fait par Nicole Voltz-Decor 2019

Marcel Collard, de Jâlons à Eickhorst (Westphalie)

Liste officielle des prisonniers de guerre 3 février 1941 - Source : BnF Gallica
Liste officielle des prisonniers de guerre 3 février 1941 - Source : BnF Gallica

Marcel Collard est né en 1916 à Jâlons.

Il est agriculteur.

Il fait son service militaire en 1936.

 

1939

Il est mobilisé à Châlons le 27 août 1939, soldat de 1ère classe du 225e R.A.D. (Régiment d'artillerie divisionnaire)

Il est habillé le 28 août 1939.
Il est aux Prémontrés dans l’Aisne le 31 août.
La déclaration de guerre a lieu le 3 septembre.

 

5 septembre Saint Léonard (Marne)
6 septembre Vitry en Perthois
8 septembre Vaux la Petite (Meuse)
9 septembre Bernécourt (Meurthe et Moselle)
11 septembre Metzervisse (Moselle)
12 septembre Herling (Moselle)
13 septembre Sierck (Moselle)
01 octobre Norroy le Veneur (Moselle)
03 octobre Hatrize (Meurthe et Moselle)
07 octobre Jouy aux Arches (Moselle)
08 octobre Ars Sur Moselle embarquement
09 octobre Reims (Marne) débarquement
Cerseuil (Aisne)
18 novembre Crouy (Aisne) embarquement
19 novembre Maubeuge (Nord) débarquement
Sars Poteries (Nord)
20 novembre La Scierie Ramousies (Nord)

 

1940

17 janvier 1940 Ferrière le Petite (Nord)
18 janvier Proix (Aisne)
27 janvier Parti en permission
09 février Rentré
07 mars Ham (Somme)
05 avril Proix (Aisne)
09 avril Parti en permission
21 avril Rentré
11 mai Taisnières-en-Thiérache (Nord)
12 mai Entrée en Belgique

13 mai Gembloux (Belgique)

Il écrit ce courrier à ses parents :

Lettre du 13 mai 1940 adressée à ses parents
Lettre du 13 mai 1940 adressée à ses parents

15 mai Ransart (Belgique)
16 mai Trazegnies (Belgique)
18 mai Hardy (Belgique)

19 mai Rentrée en France
20 mai Forêt de Raismes (Nord)
21 mai Saméon (Nord)
22 mai Ennevelin (Nord)
23 mai Templeuve (Nord)
26 mai Dranoutre Mont Kemmel (Belgique)
28 mai Rentrée en France
29 mai Bray-Dunes (Nord)
30 mai Acieries de Firmigny (Nord)
04 juin (matin) Dunkerque (Nord) Fait Prisonnier

Liste officielle des prisonniers de guerre 3 février 1941 - Source : BnF Gallica
Liste officielle des prisonniers de guerre 3 février 1941 - Source : BnF Gallica

08 juin Rexpoëde (Nord) 23 km
12 juin Hazebrouck (Nord) 32 km
13 juin Lille (Nord) 45 km
14 juin Tournai (Belgique) 25 km
15 juin Renaix 25 km
16 juin Ninove 35 km
18 juin Aalst 15 km
19 juin Termonde 13km
20 juin Lokeren 15km
21 juin Moerbecke 12 km frontière hollandaise
Embarqué par train et débarqué à Valsener (Hollande)
Pris ensuite le bateau passé à Dodreck, Nimègue, et débarqué à
24 juin Emmerick (Allemagne)
25 juin Au matin, pris le train, passé à Torsfeld, Ahaus, Gidelhaus, débarqué le soir à
Hoogstede et arrivé au camp de Bathorn
04 juillet Au matin, embarqué à Hoogstede, passé à Osnabruck, débarqué à Minden,
réembarqué à Minden Staldt et débarqué à Eickhorst Westphalie le soir ;
05 juillet a commencé à travailler

COURRIERS PAR CARTES ET LETTRES A SES PARENTS (envoyées régulièrement toutes les
semaines )
En voici des extraits.


17 juillet

carte

« Chers parents Comme vous devez le penser je suis prisonnier de guerre pas blessé bien
portant. J’espère que cette carte vous réconfortera un peu et vous trouvera en bonne santé. Ne
m’envoyez pas de colis pour l’instant je travaille je suis bien nourri et couché je vous embrasse
Marcel »


26 juillet

carte :

« Chers parents Je pense que vous êtes maintenant rassurés je suis toujours bien portant je
travaille dans une ferme et je suis bien nourri et blanchi. Si vous pouvez envoyez moi un colis
maximum 5 kg une chemise savonnette lames à rasoir ni argent ni alcool mon adresse est en bas à
gauche. Bons Baisers Collard »


01 août

lettre scannée

« …Je suis toujours bien tranquille et espère que vous avez reçu mes 2 premières
cartes. Je compte recevoir une lettre ce mois-ci. Je voudrai bien avoir de vos nouvelles car depuis le 9
mai je n’ai pas reçu de lettre. Le boulot va-t-il quand même, je souhaite et je pense qu’il n’y a pas eu
trop de dégâts par là-bas. Où avez-vous semé du foin, des betteraves, avez-vous fait de l’orge, les
récoltes sont-elles belles, je pense que Bouboule est rentré et vous aide ; le plus difficile çà aura été
les foins et surtout j’y ai bien pensé le long moment où vous avez été sans nouvelles(…) Ecrivez au
crayon et ne cachetez pas la lettre …Alors ne vous en faites pas pour moi je suis bien faites pour le
mieux prenez du personnel le plus difficile est passé mon adresse est derrière je vous embrasse
Collard Marcel »

24 août 1940

carte :

« …je pense que la moisson est finie comme vous n’avez plus beaucoup d’engrais gardez le
pour les blés mettez de l’escourgeon sur Cherville auprès du pays les 3 petits champs et à l’Ajeau n’en
mettez pas au champ la Vache … »

 

06 octobre 1940

lettre :

« Je suis toujours en bonne santé bien que j’ai engraissé de 5 kg, bien couché…envoyez moi un colis…je suis avec de bons copains Bourré de Isse est au pays à côté. Je pense que vous avez reçu de
mes nouvelles j’ai hâte d’avoir des votres….J’espère que Bouboule est rentré et que le boulot marche
faites pour le mieux mettez beaucoup d’engrais pour les blés dans les champs sur Champigneul, il a
dû faire beau temps pour la moisson et qu’il ne manque personne à Jâlons nous sommes restés à 3
copains du régiment. Je pense que vous avez encore les chevaux la moisson était-elle belle où avezvous
semé de l’escourgeon, du blé, les pommes de terre étaient-elles belles les betteraves… »

Lettre de réponse à la demande faite par ses parents le 12 octobre 1940 de le faire libérer comme soutien de famille pour l'exploitation agricole
Lettre de réponse à la demande faite par ses parents le 12 octobre 1940 de le faire libérer comme soutien de famille pour l'exploitation agricole

10 novembre 1940

lettre :

« …alors Bouboule est prisonnier aussi donnez moi un peu plus de détails quels sont ceux quisont libérés, ceux qui sont prisonniers il ne manque que le fils Legile et Cheyppe…Vous devez savoir
que vous êtes limités pour les colis vous avez droit à un colis de 1 kilo par mois et un de 5 kilos tous
les 2 mois…Je vous demande aussi quelles sont les maisons qui ont été abîmées… »


17 novembre 1940

lettre :

« …je suis toujours en bonne santé et j’espère qu’il en est de même pour vous. Alors c’est
Antoine que vous avez maintenant il n’est pas dur aux chevaux et sait travailler tachez de le
conserver ne regardez pas au prix puisqu’il vous faut quelqu’un de sérieux vous avez aussi des
émigrés çà vous rend toujours service et à eux aussi…Voici l’hiver qui arrive faites attention aux
chevaux…ne vous mettez pas en retard au besoin aidez vous les uns les autres…donnez moi un peu de
détails je vous écris quand je peux j’ai reçu 5 lettres depuis que je suis ici écrivez moi un peu plus
souvent…ne m’envoyez pas à manger je suis bien nourri… »

 

Son Père Aimable Collard est décédé le 11 juin 1942

21 juin 1942

lettre : « Chère Maman. J’ai appris jeudi par le journal la mort de mon père je comprends la terrible
douleur qui t’arrive n’avions nous déjà pas assez de malheurs, quel jour est-il mort a-t-il beaucoup
souffert sans doute qu’il m’a réclamé souvent, tu dois être bien fatiguée es-tu en bonne santé je
pense que tu n’es pas toute seule Charlotte doit être avec toi de quoi est-il mort je pense que c’est le
coeur a-t-il été longtemps gravement malade mes oncles et tantes t’ont-ils soulagés, y avait-il du
monde aux obsèques quels étaient les porteurs. Cette nouvelle m’a aussi apporté un choc mais que
veux-tu nous sommes endurcis j’ai pris le dessus çà devait toujours être le docteur Droullé qui le
soignait ; donne-moi des détails surtout es soin de toi ne te décourage pas soigne toi si tu n’arrives
pas à faire le travail vends les vaches pour les affaires fais pour le mieux j’espère que l’on t’aidera. J’ai
reçu cette semaine 2 cartes du 24 et 31 mai. Tu ne me parles pas de l’état de papa sans doute n’étaitil
pas plus mal. Je suis toujours en bonne santé et surtout ne t’en fais pas pour moi ne t’inquiète pas
non plus si tu étais un moment sans nouvelles surmonte ton chagrin que veux-tu l’on n’y peut rien
lorsque l’on est malade sans espoir de guérir et à charge. Surtout si çà ne va pas va voir le médecin ne
t’inquiète pas pour moi je t’embrasse bien fort Marcel »

 

Suite au décès de son père, sa mère se trouve seule pour gérer l'exploitation agricole. Monsieur Sendre, gérant des biens des hôpitaux de Châlons, fait donc demander sa libération par la Maison des prisonniers.
Des courriers des 5 et 11 août sont reçus en réponse, cette situation ne permet pas d'obtenir une mise en congé d'un prisonnier de guerre.

 

En mars 1943, sa mère demande sa libération au titre de la Relève. Elle est refusée.

Dans ce cadre, il était prévu que 50 000 prisonniers de guerre en Allemagne soient libérés en échange de l'envoi de 250 000 ouvriers dont 150 000 spécialistes et 100 000 ouvriers non spécialistes. La priorité est donnée par les autorités allemandes aux pères de famille veufs.

 

La correspondance se poursuit en 1943, 1944 et 1945. Marcel Collard y fait état du courrier et des colis reçus, de la météo et s'inquiète régulièrement des travaux agricoles, des récoltes, des semis, des effets de la météo sur les cultures.

 

LIBERATION AVRIL 1945
02 avril Parti d’Eickhorst passé le Weser marché pendant 180km
13 avril Arrivé dans un bois même pas d’eau d’Urzel au sud de Hambourg
16 avril à 16 h délivré par les anglais jour inoubliable parti pour le retour
17 avril à midi fait 140 km en 4 jours toujours à pied passé à Celle au nord de Hanovre arrivé à
Stadthagen en zone américaine
21 avril cantonné dans des wagons
27 avril parti de Stadthagen en auto arrivé à Rhoda Westphalie le soir
28 avril parti de Rhoda au soir en train passé à Hamm
29 avril à Wesel Hufeld Gladbach
30 avril arrivé en Hollande passé à Maastricht puis en Belgique passé à Liège, Namur, Charleroi,
rentré en France à Valenciennes
01 mai Parti de Valenciennes
02 mai au matin arrivé à Jâlons
« très bon accueil en Belgique nous avons mangé le midi 30 avril à Charleroi, mais très
mauvais accueil en France
Couché à Valenciennes visite papiers
Pris le train le 1er mai arrivé à Jâlons le 2 mai au matin »

L'Amicale des anciens prisonniers et déportés de la commune de Jâlons

La guerre se poursuivant, en 1941 (?) est constitué un Comité d'aide aux prisonniers.

Le comité reçoit une subvention municipale. Il envoie aux prisonniers des livres et surtout des colis alimentaires de 2,5 kg ou de 5 kg.

A Jâlons, de la correspondance entre les prisonniers et le Comité d'aide a été conservée :

Le 6 août 1945 est constituée l'association de l'Amicale des prisonniers et déportés en résidence à Jâlons-les-Vignes. Elle a pour but de maintenir les contacts entre les prisonniers de guerre et les déportés rapatriés. Elle interdit toute activité politique ou religieuse "afin de n'écarter le concours de personne".

Les prisonniers et déportés en constituent les membres fondateurs.

Les statuts de l'Amicale précisent que "le comité directeur peut s'opposer à l'admission de prisonniers de guerre qui soit en captivité soit après leur rapatriement ont eu une attitude anti nationale".

Le montant de l'adhésion est fixé à 100 francs par an.

Le comité directeur compte 7 membres.

L'Amicale adhère à l'association départementale et nationale.

Marcel Gilbaut a collecté et numérisé les documents liés à l'histoire de ces associations (statuts de l'amicale, liste des prisonniers, comptes de l'amicale, courriers, récépissés d'expédition de colis, etc.)